Poésie et chanson

Les rapports entre poésie et chanson sont admis depuis toujours et, à l’époque actuelle, ils sont illustrés par le fait que de nombreux chanteurs ont mis en musique et chanté des poètes : Léo Ferré a mis en musique et chanté Aragon, Brassens l’a fait pour Paul Fort ou Victor Hugo, plusieurs l’ont fait pour Baudelaire… Sous cet angle là, nul doute que les paroles d’une chanson puissent constituer un poème. Mais certains articles de presse, lors de l’attribution du prix Nobel de littérature à Bob Dylan, ont émis l’idée Les rapports entre poésie et chanson sont admis depuis toujours... par le fait que de nombreux chanteurs ont mis en musique et chanté des poètes... Mais certains articles de presse, lors de l’attribution du prix Nobel de littérature à Bob Dylan, ont émis l’idée qu’un chanteur mettant en musique ses propres vers ne serait qu’un « parolier "..., ne serait pas un poète. On peut en douter. Mais encore faut-il trouver un critère permettant de définir ce qu’est la poésie. Ce qui fait le souffle poétique dans une chanson n’est pas facile à décrire : en tout cas, il n’est pas tant la beauté du style, la vérité des observations, l’engagement du chanteur…, que, comment dire, l’évocation trouble et évanescente, la légèreté des mots, leur caractère insaisissable, en même temps terriblement présent… Une certaine ambiguïté, une aptitude à surprendre, un désordre contrôlé, un ordre fictif… Dès le début, Bob Dylan possédait ce don, qui est plus qu’un talent, lorsqu’il disait : « How many roads must a man walk down… The answer my friend is blowing in the wind… » ; la réponse est dans le vent : le vent du temps qui passe, qui souffle aujourd’hui, qui soufflera toujours… Ce don ne l’a pas quitté et on le sent lorsque dans le merveilleux texte « Man gave names to the animals », il déclarait : « He saw an animal leavin' a muddy trail  / Real dirty face and a curly tail / He wasn't too small and he wasn't too big / "Ah, think I'll call it a pig". L’invention des premiers mots – « In the beginning » dit la chanson – ressemble un peu à cette rime absurde entre « big » et « pig », une sorte de hasard. Et l’on pourrait multiplier les exemples. On a dit que tout compte fait on pourrait donner le Nobel à des chanteurs français qui avaient ce don. Il est vraisemblable que Ferré l’avait lorsqu’il déclarait : « Les coquillages figurant / Sous les sunlights cassés liquides / Jouent de la castagnette tant / Qu'on dirait l'Espagne livide / Dieux des granits, ayez pitié / De leur vocation de parure / Quand le couteau vient s'immiscer / Dans leur castagnette figure » (La-mémoire et la mer).

 

qu’un chanteur... ne serait qu’un « parolier "...

Publié le : 
18 Octobre 2016
Auteur de l'article : 
Jérôme Huet
Source(s) : 
Divers