Quotas de chanson francophone

En vertu de quotas, mesure phare de protection en faveur de la chanson francophone, il s’impose aux stations de radio de diffuser une certaine proportion de chansons d’expression française : cela a été prévu par loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, dont l’article 28 2°bis introduit par la loi dite « Carignon » du 1er février 1994 qui institue un quota minimum de 40% de chanson francophone, tout en prévoyant que « par dérogation, le Conseil supérieur de l'audiovisuel peut autoriser, pour des formats spécifiques, (d)es proportions… » plus ou moins élevées (et sur ces quotas de diffusion de la chanson francophone, v. E. Derieux, Droit de la communication, LGDJ, 2015, n° 813 et 814). Le projet de loi « relatif à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine », en discussion actuellement devant le parlement, a remis ces quotas dans le feu de l’actualité provoquant la colère d’un certain nombre d’artistes réunis autour du slogan « touche pas à mes quotas » (pétition signée par 1.800 artistes, dont Charles Aznavour, Francis Cabrel, Renaud ou Jean-Jacques Goldman…) devant la volonté affichée par certaines radios commerciales de les remettre en cause ; car ces radios se plaignent d’avoir du mal à faire des grilles de programme cohérentes en respectant les quotas, tout en soulignant que les artistes français sont de plus en plus nombreux à chanter… en anglais, ce qui ne les rend pas représentatifs de la chanson française au sens des quotas légaux ; en sens inverse, Jean-Noël Tronc, directeur de la SACEM, a pu dire que « les quotas représentent une protection de l'auditeur contre une forme d'asphyxie culturelle » (entretien dans le Journal du dimanche JDD, 12. 6. 2016) ; et d’ajouter que les quotas « ont prouvé en vingt ans leur efficacité… (car) la France est le seul pays d'Europe où les productions locales sont majoritaires. En 2014, sur les 100 premières ventes d'albums, 64 étaient interprétées en français. Ils ont permis à une génération d'artistes d'émerger dans les années 1990 et 2000… (car) si Zaz ou Maître Gims triomphent à l'étranger avec des chansons en français, c'est aussi grâce aux quotas » ; d’où la conclusion : « Il est irresponsable de vouloir affaiblir les quotas au moment où la chanson française se porte aussi bien artistiquement, mais reste fragile économiquement » (entretien précité). Par ailleurs, certains dénoncent une dérive dans la mise en œuvre des quotas : les radios s’y conformeraient en faisant tourner en boucle les mêmes succès, 10 titres pouvant représenter jusqu'à 75 % des diffusions francophones mensuelles sur certaines radios ; un manque de diversité à l’encontre duquel un amendement a été introduit en commission par Patrick Bloche, rapporteur du texte, amendement qui vise à empêcher les mêmes titres francophones de tourner en boucle sur les ondes des radios.

Publié le : 
20 Juin 2016
Auteur de l'article : 
Jérôme Huet
Source(s) : 
Divers